top of page

Conrad Detrez naît le 1er avril 1937 à Roclenge-sur-Geer, non loin de Liège, dans la Province de Limbourg en Belgique, d'un père d'origine wallonne et d'une mère d'origine flamande. Il passe une enfance en milieu rural fortement marquée par le catholicisme, les bombardements, les crues de la rivière Geer, la deuxième guerre scolaire belge, l'ennui dû à l'absence de divertissement et l'horreur éprouvée devant le spectacle des bêtes égorgées par son père, boucher de profession.

​

Il étudie brillamment à l'école communale du village et au catéchisme de la paroisse. En 1949, il entre au pensionnat du Collège de Visé, puis à celui de Herstal où il poursuit des études secondaires gréco-latines. En 1957, tenté par la prêtrise, il entre au séminaire de Saint-Trond.

​

Tandis que sa mère meurt en 1959, il entame une licence de philosophie et théologie à l'Université catholique de Louvain. Il y fait la rencontre de jeunes étudiants originaires de pays du tiers-monde, sud-américains notamment – qui, par leurs témoignages, favorisent sa prise de conscience politique et suscitent son désir d'engagement. Sensibilisé aux réalités politiques et économiques de pays comme le Brésil, à la révolution castriste et à la situation algérienne, il est encore un observateur passionné des mouvement de grèves insurrectionnelles de la classe ouvrière wallonne qui agitent son pays durant l'hiver 1960-1961.

​

Traversé par une crise intérieure religieuse, philosophique, politique et morale, il décide en 1961 d'interrompre ses études et renonce à entrer dans les ordres. A l'instar de jeunes gens de sa génération, il pense possible de refondre l'Homme dans le contexte des pays du tiers-monde en voie de décolonisation et de libération. Fuyant simultanément l'Eglise, son village, sa famille, et la perspective d'un service militaire au Congo belge, il décide d'émigrer au Brésil en juillet 1962.

​

Il s'installe à Volta-Redonda puis à Rio de Janeiro où il obtient une licence de Lettres et enseigne dans plusieurs collèges catholiques. Il y découvre la liberté des mœurs brésiliennes et s'éveille aux ambiances sensuelles et érotiques, homosexuelles ou hétérosexuelles, de Rio de Janeiro. Après le coup d'état militaire qui renverse le Président Joao Goulart en 1964 et installe le régime dictatorial du général Castelo Branco, il s'engage dans l'opposition et l'activisme politique au sein du Movimiento Democratico Brasileiro et soutient l'action dirigée par Carlos Marighella. Ses activités militantes et journalistiques suscitent la méfiance de ses élèves et supérieurs hiérarchiques et le contraignent à la clandestinité.

 

En 1967, il est arrêté par les forces de l'ordre, emprisonné durant six jours, torturé puis expulsé du territoire brésilien. Il rentre en Europe, en Belgique puis en France où il séjourne à Paris durant le mouvement de contestation de mai 68. Lors de la même année, il retourne cependant au Brésil pour y reprendre – à Sao Paulo – sa lutte clandestine dans les rangs de l'opposition castriste. Menacé par le régime en place, il renonce au bout de quelques mois au combat et quitte le pays.

 

BIOGRAPHIE

En 1970, il écrit en collaboration avec Carlos Marighella (et traduit en français) Pour la libération du Brésil qui fait l'objet d'une interdiction de diffusion par le ministre de l'Intérieur, Raymond Marcellin, qui utilise à cette fin un décret du 6 mai 1939 sur les nécessités de la défense nationale. L'ouvrage est cependant publié sur l'initiative, et sous les noms des 23 plus importants éditeurs français qui se déclarent solidairement responsables de la publication et entendent s'opposer à la censure gouvernementale.

​

Condamné à deux ans de prison par le tribunal militaire de Rio de Janeiro, fragilisé par le sentiment d'un échec de la tentative révolutionnaire et celui, plus personnel, de sa vie affective ; marginalisé par son homosexualité dans une société européenne encore très conformiste, il décide de s'exiler une nouvelle fois en Algérie à Sour El Ghozlane (Wilaya de Bouira) où il devient professeur dans un lycée de province. Il y poursuit la traduction d'ouvrages brésiliens commencée à Paris, s'intéresse à la psychanalyse et découvre l'écriture épurée des premières œuvres de Mohammed Dib.

​

Il y entame la rédaction de son premier roman, Ludo, autobiographie hallucinée dans laquelle il entreprend de reconstituer l'itinéraire de son enfance paysanne. Il rentre à Bruxelles en 1972 où il achève Ludo publié plus tard en 1974, et poursuit le récit de son parcours, à travers l'adolescence, dans un deuxième roman, Les Plumes du coq.

​

En 1975, il est nommé correspondant de la Radio-Télévision Belge à Lisbonne d'où il rend compte de la Révolution des Œillets.

 

En 1978, il s'installe à Paris et collabore au journal Le Matin de Parisau Magazine littéraire et à la revue Esprit Il publie en 1978 son troisième roman: L'Herbe à brûler, qui retrace la suite de sa vie et obtient le Prix Renaudot 1978.

​

Amnistié par le gouvernement brésilien, il retourne au Brésil en 1980 et l'évoque à nouveau dans un essai : Les Noms de la tribu, ainsi que dans son quatrième roman : La Lutte finale, publié la même année.

​

En 1981, il publie Le Dragueur de Dieu, roman traitant de l'amour homosexuel ; puis en 1982, La Guerre blanche, où il évoque son aspiration au métier d'écrivain.

​

Le 28 mars 1982, il est naturalisé français et nommé, en septembre, attaché culturel à Managua au Nicaragua, pays marqué par la révolution sandiniste. Cette expérience lui donne la matière au dernier roman qu'il publie de son vivant en 1984 aux éditions Gallimard: La Ceinture de feu.

​

Il demeure au Nicaragua jusqu'en septembre 1984, avant de rentrer à Paris, atteint du sida dont il meurt le 12 février 1985. Un ultime roman, La Mélancolie du voyeur, paraît en 1986 après sa mort.

 

En 1990, William Cliff lui rend un hommage littéraire et poétique dans son ouvrage Autobiographie suivi de Conrad Detrez .

​

bottom of page